Olga Platonova

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Olga Platonova
автор Mikhaïl Bogatyrev (1963)
Опубл.: 12/03/2023.

Olga Platonova ( en russe: Платонова, Ольга Дмитриевна; née le 2 décembre 1961 ) est une icônographe orthodoxe et enseignante vivant en France; elle est responsable de l'atelier dicônographie Anagogia.

Olga Platonova, icônographe
formation: L'Institut Répine (beaux-arts)
Institut Saint-Serge, Paris


Biographie

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L'icônographe Olga Platonova est née à Leningrad en 1961 dans une famille de scientifiques : son père enseignait la philosophie à l'Université, sa mère enseignait l'économie à l'Institut Pédiatrique. Malgré l'idéologie marxiste-léniniste totale et la propagande antireligieuse qui ont imprégné toutes les sphères de la vie dans le pays des Soviets, Olga Platonova a ressenti un désir pour l'église dans sa prime jeunesse. La route du retour de l'école longeait le cimetière " Smolenskoe ". La chapelle du Sainte-Xénia de St-Pétersbourg[1] était condamnée à cette époque, mais on pouvait entrer dans l'église du cimetière, se tenir devant les icônes, attendre le service du soir…

Après avoir terminé l'école elle a poursuivi ses études, d'abord à l'Institut électrotechnique, puis à la Faculté de psychologie de l'Université de Leningrad. En outre, elle a participé à des expéditions géologiques en Sibérie orientale et s'est engagée dans des activités de traduction (en particulier, elle a traduit le roman de Douglas Adams Le Guide du voyageur galactique de l'anglais).

"Il y a une table près de la fenêtre" - huile sur toile; 1989


Les études aux cours de dessin de l'Académie des Beaux-Arts ( Institut Ilya Repin ) a été une étape très importante pour qu'Olga comprenne sa véritable vocation. La conscience de soi en tant qu'artiste s'est développée déjà en France, où Olga Platonova a déménagé au début des années 1990.

Ses tableaux ont été exposées à l'Assemblée Nationale de France ( Salon Lucy Faure, 1999 ), à la Cité des Arts, au Manège de Saint-Pétersbourg ( Salon des Indépendants « Sea Level », 2007 ), et dans de nombreuses galeries. Par ailleurs, pendant plus de dix ans, Olga Platonova ( avec les poètes Mikhail Bogatyrev et Irina Karpinskaya ) a édité et conçu la revue littéraire parisienne «Stéthoscope»[2], publiée avec le soutien de la maison d'édition " Syntaxis "[3]; au fil des ans, elle a organisé plus d'une trentaine de soirées littéraires.

Voir l'album de graphismes d'Olga Platonova (sous pseudonyme Mitrich) "Une bouteille d’encre" (1997)

Parallèlement et même dans un sens, indépendamment de toute cette activité culturelle aux multiples facettes, elle y a eu une initiation à l'Église, une participation à la vie paroissiale de l'église de la Présentation du Très Saint Théotokos au Temple et de skite de l'icône de la Mère de Dieu de Kazan. Au fil du temps, il est devenu évident que pour un artiste croyant, la voie la plus naturelle est la peinture d'icônes (ou « théologie en couleurs », selon Leonide Ouspensky). Au milieu des années 1990, Olga Platonova a commencé à peindre des icônes.


Atelier d'icônographie « Anagogia »

Mère de Dieu de Kazan

En 2007, le père Nikolai Rebinder, recteur de l'église de la Présentation du Très Saint Théotokos au Temple, a chargé Olga d'organiser un atelier d'icônographie à l'église.

L'essentiel des cours de l'atelier est consacré à la peinture de l'icône selon le modèle choisi. Le programme de formation prévoit le développement pratique de la technique byzantine[4], ainsi que les études de la tradition orthodoxe, de la théologie[5] et des éléments d'hagiographie.

Le révérende Euthyme de Moisenay

Des écoles icônographiques d'hiver et d'été sont organisées deux fois par an (en règle générale, en février et en août). Il s'agit de stages intensifs de familiarisation avec l'iconographie, une sorte d'« immersion dans le métier ». De plus, des cours spéciaux sont organisés périodiquement pour se familiariser avec les bases de la technique d'imposition de l'or et la pratique de la dorure. Le programme de l'atelier est construit sur une combinaison de théorie et de pratique, en tenant compte des différents niveaux de formation des étudiants : parmi les participants, il y a des débutants et des peintres d'icônes confirmés qui cherchent à améliorer leurs connaissances. L'enseignement est dispensé en français et, si nécessaire, est doublé en russe.

Sainte Marie de Paris
Le Christ Pantocrator
(«Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués…»)


Les cours de l'atelier « Anagogia » se commencent et se terminent par une prière commune. L'icônographie est avant tout une prière, et de plus, c'est une réflexion et une contemplation, élevant l'esprit des essences terrestres aux essences célestes. Une condition indispensable pour travailler sur une icône — c'est la connaissance des anciennes images iconographiques.

Le concept de l'école implique l'étude de la technique de l'icônographie en unité inséparable avec le travail spirituel, car l'écriture d'une icône est impossible sans la connaissance des bases de la théologie orthodoxe et de la pratique ascétique. Non moins importante est la compréhension de la structure symbolique de l'icône, sans laquelle l'iconographie se transforme en reproduction banale.

La Nativité du Christ, 2023


Emplacement des icônes.
Activité culturelle et éducative

Les icônes peintes par Olga Platonova se trouvent dans la cathédrale Fedorovsky ( Saint-Pétersbourg ), dans diverses églises en France : dans le skite de l'icône de la Mère de Dieu de Kazan, dans les églises de la Présentation (Paris) et de l'Assomption (Sainte-Geneviève-des-Bois), dans la chapelle du Château de Moyeaux ( Chapelle-Rabelais ), dans la chapelle Ménil-Marie de la skite Notre-Dame de Panachranta ( Saint-Martial ), ainsi que dans des demeures privées.

Des icônes peintes par Olga Platonova ont été exposées à Paris à la Maison des sciences et de la culture russe ( 2002 ), au Centre culturel serbe (exposition personnelle, 2010). Des expositions personnelles ont été organisées à Melun ( 77000 ) en Collégiale Notre-Dame ( 2008 ) et en l'église Saint-Aspais ( 2005, 2007 ). Depuis 2017, Olga Platonova participe au projet « Les Saints de l'Église indivise », organisé par le Commonwealth en faveur de l'art chrétien « Artos ». Dans le cadre de ce projet, ses icônes ont été présentées au Central Exhibition Hall de Minsk ( Biélorussie, 2017 ), au Monastère de Novo-Valaam ( Finlande, 2018 ), au Collège des Bernardins (janvier 2020)[6]. Olga Platonova a donné un certain nombre de conférences; en particulier, la presse a couvert son rapport « Arts et traditions de l'icône », lu à l'invitation de l'Association « Nazareth » .

L'activité d'un iconographe se limite rarement aux beaux-arts. Olga Platonova apporte une contribution possible à la vie paroissiale. Elle a traduit en russe et préparé pour publication le livre de René Lavocat « L'évolution, l'origine de l'homme et la foi chrétienne » ( 2005 ), a écrit une série d'articles sur des sujets théologiques pour la publication moscovite « Teacher's Newspaper » ( 2010 ), a participé dans la compilation du dictionnaire biographique « Diaspora russe en France » ( 2010 ), a été l'un des co-éditeurs et compilateurs des livres « Histoire de la paroisse émigrée. La paroisse de la Présentation » ( 2015 ), « L'archimandrite Euthyme et l'église Notre-Dame de Kazan » ( 2018 )[7].


Les icônes

2025

Saint Pierre et Sainte Fevronia de Mourom


Saint Ambroise de Milan (Église Saint-Séraphin-de-Sarov de Paris)


Triomphe de l'orthodoxie (Église Saint-Séraphin-de-Sarov de Paris)


2024

Le roi David avec la harpe


Le roi David avec l'arche (Église Saint-Séraphin-de-Sarov de Paris)


Antoine Le Grand ("Les personnes prudentes devraient toujours se rappeler que en accomplissant de petits travaux dans cette vie, nous recevrons la plus grande consolation et la félicité éternelle après la mort". §76 "Sur les bonnes mœurs et la sainteté de la vie", en 170 chapitres)


La table de travail dans l'atelier iconographique


Saint Eloi, évêque de Noyon (VII siècle), patron des mécaniciens / dessin d'icône


Saint Eloi (paroisse N.-D. de Toute Protection, Compiègne, France)


Saint Constantin le Grand, l’empereur romain et sa mère sainte Hélène


2023

Bibliographie
  • KICHILOV Paul - DELEGUE Vincent.‎ Le Voyageur immobile. - Poèmes.‎ Traduction par Olga Platonova
  • KICHILOV-DELEGUE.‎ Le Voyageur immobile. Éditeur : Paris, Les Editions Signum, 2000
  • (ru) Dictionnaire «L’Emigration russe» vol.2 (Л - Р) – L’Emigration russe en France 1919-2000 , dictionnaire biographique , en 3 vol., sous la dir. de L. Mnoukhine, M. Avril, V. Lossky. – Volume 2 (L-R) , page 453. – Moscou, Maouka, Musée de M. Tsvétaeva, 2010.
  • [Словарь «Российское зарубежье» т.2] – Российское зарубежье во Франции 1919-2000, биографический словарь, в 3 т., под ред. Л. Мнухина, М. Авриль, В. Лосской. – Том 2 (Л-Р), стр. 453. – М., Наука, Дом-музей Марины Цветаевой, 2010.
  • (ru) saints.artos – Catalogue de l'exposition internationale «Les Saints de l'Église indivise» (commissaires: S. Chapnin, I. Yazykova, etc.). – Commonwealth «Artos», Minsk, 2017, page 100.
  • [saints.artos] – Международный выставочный каталог «Святые неразделенной церкви» (кураторы: С. Чапнин, И. Языкова и др.). – Содружество «Артос», Минск, 2017, с.100.
Notes et références
  1. Sainte Xenia de St-Petersbourg sur www.histoire-russie.fr (consulté le 10 mars 2023)
  2. La revue parisienne « Stéthoscope », dédié à la poésie visuelle et à l'ontologie de la culture, faisait partie du mouvement post-avant-gardiste russe des années 1990. Elle a été publiée par les poètes Mikhail Bogatyrev et Irina Karpinskaya ; rédacteur en chef – Olga Platonova. Entre 1993 et 2010, quarante numéros du magazine « Stéthoscope » ont été publiés. La rédaction russe était dirigée par Alexander Eleukov, qui a formé la publication indépendante « Aestétoscope » au milieu des années 2000.
  3. Revue éditée à Paris par Maria Rozanova et André Siniavski.
  4. Voir : "Histoire de l'icône byzantine"
  5. Voir : "Théologie de l'icône"
  6. Parmi les icônes exposées au Collège des Bernardins figurent deux images peintes par Olga Platonova : Sainte Marie de Paris et Saint Jean de Shanghai.
  7. https://wikilivres.ru/L%E2%80%99archimandrite_Euthyme_et_l%E2%80%99%C3%A9glise_Notre-Dame_de_Kazan_(Bogatyrev)


Liens externes
  • « Cette image est une image » – un film documentaire autour d’iconographie d’Olga Platonova et Gilles Weissmann, réalisé par Agathe Seau ( 2015; 26 min )


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Olga Platonova dans son atelier (éspace SSOCAPI, Paris, 1997) entourée d'artistes non-conformistes V. Vorobiev (au centre), N. Leonov, V. Samarin et O. Sokhanevich


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Olga Platonova dans son atelier (1997)


Les articles théologiques d’Olga Platonova

Iconographie de l’Eglise ancienne

L’art chrétien apparait avec le début de christianisme. Dès ses premiers pas la chrétienté commence à élaborer son propre language artistique. Les anciennes méthodes, inhérentes à l’art antique païen, étaient incapables d’énoncer des idéaux nouveaux. La problématique de la nouvelle réligion, tout en reflétant une nouvelle vision de la réalité, réclamait des formes nouvelles d’art. Les fresques des catacombes des premiers siècles nous montrent des exemples éclatants des tentatives de représenter l’Invisible à travers les objets du monde matériel, de transmettre le message de l’Au-delà à coup de choses appartenant au monde terrestre.

La nouvelle tendance obéit aux exigences de ses objectifs : exprimer en art plastique les points principaux du dogme de l’Eglise, traduire la réponse évangélique aux demandes essentielles de la vie quotidienne. Les images sont conformes à la doctrine de l’Eglise, aux textes des Evangiles ainsi qu’à la Sainte Tradition qui venait de naître. L’absence en ces temps-là de la théologie chrétienne explicite et précise qui ne fut développée que plus tard, détermina le caractère symbolique de l’art paléo-chrétien.

Pourtant, sont connus d’autres motifs du symbolisme de l’iconographie de l’Eglise primitive. L’état poursuivi de l’Eglise des premiers siècles, son entourage étranger et souvent hostile prédéstinèrent le caractère spécifique de l’art des premiers chrétiens : son ésotérisme, sa language symbolique, ses objectifs instructifs et dogmatiques. Selon saint Cyrille de Jérusalem, les images doivent être symboliques pour préserver le mystère des païens et même des néophytes. La révélation inappropriée du mystère doctrinal de la Bonne Nouvelle peut s’avérer dangereuse. De même que Jésus s’exprime par des paraboles dont il n’éclaircit le sens qu’à ses disciples, la signification des images doit être dissimulée pour ne pas nuire aux profanes. Les symboles ne sont compréhensibles que pour les initiés. Les symboles païens, les sujets antiques, les objets ordinaires, les thèmes de l’Ancien Testament, étant utilisés dans des buts didactiques et instructifs, se remplissent d’un contenu nouveau, en se transfigurant en concordance avec un objectif d’enseignement bien déterminé. Différemmement des symboles néo-platoniciens, les images significatives chrétiennes[1] sont appellées à énoncer les fonctions variées de Dieu, orientées vers l’humanité.

Les images de la vigne signifient le sacrifice dans la Nouvelle Alliance, l’Eucharistie donnée par le Christ à ses disciples, le Corps et le Sang du Christ que nous reçevons pendant la communion ; les oiseaux autour de la vigne symbolisent les fidèles. Le poisson, symbole largement répandu dans l’art de l’Eglise primitive, signifie le Christ ; le mot ICHTHUS (poisson en grec) est consideré comme abréviation de la phrase « Jesus Christ, Fils de Dieu, Sauveur ». De nombreux petits poissons autour d’un grand nous montrent les croyants autour de Jésus.[2] Un bateau, parfois représenté sur le dos du poisson, fait allusion à notre salut à l’aide du Christ de la même façon qu’une ancre. Le pasteur entouré de brebis, ou encore portant l’agneau sur son épaule, image très populaire qu’on appelle « Le Bon Pasteur », représente le Christ comme pasteur bienveillant. L’agneau, symbole de la victime innocente qu’on trouve déjà dans l’Ancien Testament, est assimilé au sacrifice expiatoire du Christ. La colombe, aussi symbole de l’Ancien Testament, représente le Saint Esprit. Les images des pêcheurs, largement utilisé dans Nouveau Testament, nous parlent des disciples de Jésus. Dans l’image du phénix, ressuscitant dans le feu, les croyants aperçevaient la résurrection du Christ. Le pélican, nourissant sa progéniture avec ses propres entrailles, faisait penser à l’abnégation du Fils de Dieu qui donna Sa vie en rédemption des pêchés de l’humanité.

Nous voyons bien que l’art chrétien des trois premiers siècles se servait aisément tant des notions de la vie de tous les jours que des symboles propres au paganisme. De surcroît, même la mythologie antique, transfigurée par la conscience collective des premiers chrétiens, remplie par le contenu de la Nouvelle Alliance, entrait facilement dans le language figuratif. Psyché était tenu pour l’image de l’âme chrétienne, Amour – pour symbole de l’Amour Divine. Persée était consideré comme l’archétype de saint George, Ulysse devant les sirènes était vu comme le chrétien devant les tentations, Orphée présentait le roi David sinon le Christ Lui-Même, le Verbe de Dieu, dont les paroles règnent sur les coeurs du peuple et dominent même les éléments.

Le sens des symboles de l’Ancien Testament est saisi différemmement. Le serpent en cuivre appartenant au Moïse et possédant des vertus curatives renvoie à la guérison de nos pêchés par l’Eucharistie. La stamna contenant la manne, le pain céleste donné par Dieu au peuple d’Israël pendant la fuite dans le désert signifie la Vierge qui portait en soi le Vrai Pain produisant le vie éternelle. Esther qui sauva le peuple juif de l’extermination ordonnée par le roi Assuérus, est aperçue comme la Vierge Marie qui intercéda devant Dieu en notre faveur. Des évènements décrits dans l’Ancien Testament sont mis eux aussi sur un autre niveau de conception. Le sacrifice d’Abraham, prêt à immoler son fils unique pour accomplir la volonté de Dieu, était compris par les croyants comme l’archétype du sacrifice rédempteur du Christ. Par la délivrance miraculeuse du prophète Daniel dans le fossé aux lions on entend la résurrection du Christ. L’extraction de l’eau par Moîse dans le désert pour donner à boire aux gens épuisés est considéré comme l’archétype de l’étanchement des assoiffés de connaissance ; l’eau du rocher est l’archétype de la Grâce de Dieu. On trouve souvent des symboles de salut : l’arche de Noé, la traversée de la Mer Rouge, la delivrance des trois garçons dans le fourneau. Les prophéties d’Elie et d’Iona, étant accomplies, prennent aussi une toute une autre dimension.

Cependant, en même temps que des symboles on trouve dans les catacombes des compositions représentant des scènes de Nouveau Testament ainsi que des icônes du Christ, de la Vierge et des saints.

Pourtant il importe de mentionner que si dans la partie orientale de l’empire, où les saints pères doutaient de la possibilité de représenter Dieu, prépondéraient des images symboliques, voire des décorations ornementales, dans la partie occidentale des images anthropomorphes existaient déjà à partir du deuxième siècle.

L’iconographie se base sur l’union du réalisme historique et des éléments symboliques. Le laconisme de la peinture, le minimum de détails se marient avec un maximum de l’expressivité. L’apparition de ces éléments nouveaux par rapport à l’art antique est prédéterminée par une nouvelle vision des rapports réciproques entre le monde matériel et le monde spirituel : si l’art de l’antiquité, distingué par son monisme rigoureux, niait l’existence de contradiction entre l’âme et le corps, considérant le corps comme une manifestation harmonieuse de la vie de l’esprit et mettant sur le même pied la beauté physique et la beauté spirituelle, l’art chrétien se caractérise par un dualisme prononcé. Dans la conception du monde chrétien l’âme et le corps se mettent en opposition. Tous ce qui appartient à l’univers des choses matérielles doit être réprimé pour l’acquisition d’une spiritualité maximale. L’iconographie est à la recherche des moyens adéquats pour exprimer sa propre compréhension du monde créé. Par conséquent la peinture tâche de substituer les images en trois dimensions par des plans abstraits ; les figures, étant présentées comme des esprits immatériels, deviennent incorporelles. Les relations entre les personnages disparaissent, la possibilité de la communication avec le spectateur devient le souci principal de l’iconographie.

Les icônes du Christ et de la Vierge sont fondamentales pour l’art chrétien. La Sainte Tradition affirme que la première image du Christ, l’icône acheiropoiète, fut été acquise par l’humanité pendant Sa vie. Selon le récit, le Christ Lui-même a envoyé une écharpe sur laquelle Il aurait imprimé Son visage à Abgar, roi d’Edesse. Dans la suite des évènements ce voile fut emmuré avec une veilleuse devant lui à cause du danger iconoclaste et ne fut retrouvé que quelque siècles plus tard : la veilleuse était toujours allumée, et le Saint Visage reproduit sur une tuile ; ainsi nous connaissons deux icônes acheiropoiètes du Christ. On estime que les premières icônes de la Vierge aussi furent créées de son vivant. Les traits de la Mère de Dieu furent empreints par saint Luc l’évangéliste pendant la vie de la Vierge Marie, après la Pentecôte, et envoyées à cet « excellent Théophile », un antiochéen d’origine noble converti récemment au christianisme, à qui sont adressés le troisième évangile et les Actes des apôtres.

Dans les catacombes romaines les images du Christ, de la Vierge, des apôtres, des martyrs, des anges sont largement répandus. Les personnages sont peints isolément aussi bien que faisant partie de compositions multifigurarives, reproduisant les faits évangéliques, évènements de la vie du Christ, dans la plupart des cas des scènes des miracles accomplis par Jésus. L’image de la Vierge se trouve aussi dans les scènes du Nouveau Testament : de l’Annonciation, de la Vénération des mages, de la Nativité. On voit bien que la tradition des images peintes existait déjà au temps des apôtres, le fait qui était souligné au VIIe Concile oecuménique. L’existence de l’image de Dieu après la Nouvelle Alliance est une conséquence logique de son absence dans l’Ancien Testament. Contrairement à un point de vue assez populaire, l’ancêtre de l’image de Dieu à l’époque du christianisme est l’absence de celui-ci avant l’Incarnation, et pas le moins du monde l’idole païenne.

La prohibition de créer les images dans l’Ancien Testament, qui d’ailleurs n’était pas absolue (voir les instructions de la construction de l’Arche de l’Alliance dans le Deutéronome indiquant avec précision les détails de la fabrication des chérubins), n’était qu’une mesure temporaire, visant des buts pédagogiques. Il faut mentionner qu’il était catégoriquement défendu de rendre culte aux images crées, l’adoration étant dûe au Dieu seul, et non de sculpter ou de peindre. L’interdiction de représenter le Dieu Invisible de l’Ancienne Alliance comprend necéssairement l’imposition de Son image après l’accomplissement des prophéties de Sa Venue.

Par l’Incarnation l’Invisible s’est révélé visible, l’Indescriptible est devenu descriptible, le Dieu est apparu en chair. Le genre humain a vu l’image charnelle de Dieu, visible par des yeux terrestres et par conséquent il est devenu possible de Le représenter.

Bien que ces idées n’étaient formulées par saint Jean Damascène qu’au VIIIe siècle, elles articulent clairement le point de vue qui déjà existait implicitement dans la doctrine de l’Eglise primitive dès le début de son existence.

Bibliographie

  • Olivier Clement. A propos d'une Théologie de l'Icône.
  • Basmanova, R. L’Image dans l’art chrétien.
  • Beaude ; P.-M. Premiers chrétiens, premiers martyrs.
  • Bolotov, V. Leçons d’histoire de l’Eglise ancienne. Saint Petersbourg, 1918.
  • Clément, O. Présentation de l’Eglise Orthodoxe.
  • Clément, O. Présentation de l’Eglise Orthodoxe.
  • Danielou, J. Les symboles chrétiens primitifs.
  • Hopko, p. T. Histoire de l’Eglise.
  • Karéline, p. R. A propos du langage de l’icône orthodoxe.
  • Kartachev, A. Histoire des Conciles Oecumeniques. Holy Trinity Orthodox School.
  • Kroug, p. G. Réflexions sur l’Icône.
  • Lasarev, V. Histoire de la peinture byzantine.
  • Meyendorf, J. L’Eglise Orthodoxe hier et aujourd’hui.
  • Ouspensky, L. Théologie de l’Icône de l’Eglise Orthodoxe.
  • Ouspensky, L. Essais sur l’histoire de Byzance.
  • Posnov, M. Histoire de l’Eglise chrétienne. Holy Trinity Orthodox School, 2002.
  • Schmemann, A.. Le chemin historique de l’Orthodoxie. Paris,
  • Spasski, p. S. La foi orthodoxe sur la vénération des icônes.
  • Talberg, N. Histoire de l’Eglise. Holy Trinity Orthodox School.
  • Troubetskoï, E. Spéculation en couleurs.
  • Vassiliev, A. Histoire de Byzance.
  • Yasykova, I. La gloire de l’Orthodoxie.

Notes

  1. Selon la définition de V. Veidlé.
  2. Tertullien commente ce symbole de façon suivante : « Nous sommes les petits poissons menés par notre ICHTHUS ; nous sommes nés dans l’eau et nous ne sommes sauvés qu’en restant dans l’eau ».


La controverse iconoclaste

La crise iconoclaste suscite beaucoup d’intérêt tant par ses aspects non élucidés jusqu’à maintenant que par son actualité, son utilité pour comprendre les tendances icônoclastes contemporaines. On peut examiner la question sous bien des angles, philosophiques comme historiques, politico-sociologiques comme théologiques. Dans ce travail nous allons nous limiter à l’exposition globale du déroulement des évènements historiques ainsi que leurs causes, à une brève analyse des arguments pro et contra, sortis par les iconoclastes et les défenseurs de la vénération des icônes, et à un court exposé des bases théologiques de la controverse iconoclaste.

Les chercheurs avancent différents facteurs comme causes du mouvement iconoclaste. Certains théologiens mettent au premier plan les raisons économiques de la politique iconoclaste des empereurs. Effectivement, dans la première moitié du VIII siècle il y avait à Byzance pas moins que 100 000 moines, et les biens de l’Eglise étaient considérables. Vu qu’à cette époque l’Empire était presque tout le temps en état de guerre et par conséquent en manque perpétuel d’argent, on peut croire que les empereurs considéraient avec bienveillance l’idée de s’emparer des biens de l’Eglise, d’autant plus que les moines étaient exonérés du service militaire comme du service civil. Il est nécessaire de mentionner, d’ailleurs, que les répressions contre les moines n’ont commencé que sous la règne de Constantin Copronyme, l’activité iconoclaste de Léon III n’étant pas dirigée contre les monastères.

D’autres mettent en avant les raisons politiques, estimant que Léon III décida d’interdir la vénération des icônes pour détruire un des obstacles principaux d’union eventuelle des chrétiens, musulmans et juifs sous un même gouvernement et rendre plus facile leur future soumission à l’Empire. Certains théologiens considèrent que l’empereur lança le mouvement iconoclaste dans le but de diminuer l’influence de l’Eglise, notamment de reprendre l’éducation des mains des ecclésiastiques.

On estime parfois que l’influence du judaisme n’a pas joué le dernier rôle dans les représsions des défenseurs des icônes. Effectivement, Léon III était assez proche de l’Etat Khasar ce qui se voit bien du fait qu’il maria son fils à une princesse Khasare. Pourtant, on ne peut pas soupçonner l’empereur d’une sympathie excessive envers les principes judaiques, vu l’obligation du baptême imposée par l’empereur aux juifs et les persécutions de ceux qui refusaient de se soumettre à sa volonté.

On évoque aussi l’influence islamique sur les actions de Léon III. En effet, l’interdiction d’utiliser les images sacrés sur le territoire musulman, concernant les adeptes de tout les cultes y compris les chrétiens, fut prononcée par le calife Iesid en 723. Trois ans plus tard, Léon III éditait un décret similaire. Néamoins, il est peu probable qu’un empereur défendant constamment le monde chrétien contre la menace de l’invasion musulmane soit influencé par la mentalité islamique.

Enfin, beaucoup de chercheurs avancent l’existence des tendances iconoclastes à l’intérieur de l’Eglise elle-même. Ces tendances constituaient une protestation spontanée contre les attitudes payennes pratiquées par nombreux croyants envers les icônes. Il est connu que certains prêtres grattaient la peinture des icônes pour mélanger la poudre à la communion, considérant ainsi le fait d’avaler la peinture comme communion avec Celui représenté sur l’icône. Il y avait des croyants qui prenaient les icônes pour les vivants, les appellant comme témoins pendant la cérémonie de baptême, de prise d’habit et ou encore devant le juge. Les superstitions étaient en plein essor. Les traditions payennes étant profondement enracinées dans la conscience publique, la théologie de l’iconographie n’étant pas encore élaborée, les gens ne savaient pas distinguer l’image et son archétype, alors la vénération des icônes se transformait donc parfois en idolâtrie, et la prière – en acte de magie.

De plus, la profanation des icônes était aggravée par la noblesse byzantine qui prenait l’habitude d’utiliser les images des saints, des anges et même de la Vierge et du Christ pour décorer leurs vêtements, imitant les habits sacerdotaux des prêtres.

Ces pratiques abusives ne pouvaient pas n’être pas considérées comme révoltantes par grand nombre des moines orthodoxes, qui constituaient le soutien du mouvement iconoclaste à l’intérieur de l’Eglise. La partie iconoclaste s’appuyait sur la fameuse lettre d’Eusèbe à Constancia, soeur de l’empereur Constantin le Grand, où l’évêque de Césarée s’étonne sur le désir de celle-ci d’acquérir une icône du Christ et produit explicitement les arguments d’inutilité des tentatives de représenter l’image du Christ. On citait aussi les paroles de saint Athanase : « Image de Dieu invisible est l’image invisible » et évoquait de nombreuses citations des oeuvres des saints pères qui s’exprimèrent sur la question. La situation devenait encore plus compliquée à cause de l’existence de sectes hérétiques dont les adeptes rejetaient la vénération des icônes (certains monophysites, paulikiens, etc.).

La période d’iconoclasme est divisée en deux étapes : de 726 jusqu’au VIIe Concile oecuménique, convoqué en 787 à Nicée sous le règne d’Irène, et de l’avènement au trône de Léon V Arménien en 813 jusqu’au rétablissement définitif de la vénération des icônes au Concile de Constantinople en 843 sous le règne de Théodora.

Le début de l’iconoclasme date de 726 quand Léon III Isaurien déclara bien haut ses opinions iconoclastes. Au début l’empereur essaya de procéder par persuasion : il se produisait en public en organisant les débats afin de convaincre le peuple d’abandonner le culte des icones, fit un appel au patriarche de Constantinople Germain le Confesseur et tenta d’en faire un allié dans son combat contre la vénération des icones. Le patriarche Germain refusa catégoriquement de suivre les opinions de l’empereur (c’est pour cela qu’il fut envoyé en exil en 730). Léon III rédigea aussi une missive au pape de Rome Grégoire II, déclarant la primauté de ses opinions suite à sa position de roi et prêtre et incitant le pape à se rejoindre aux ses vues iconoclastes. La réponse du pape fut prompte. Ne mettant pas en doute les droits royaux et sacerdotaux de l’empereur, le pape indiqua fermement que ces droits ne pouvaient être exercés que par les empereurs professants une vraie foi orthodoxe ; puisque les opinions de l’empereur contredisaient les dogmes de celle-ci, ils ne pouvaient guère être acceptés par l’Eglise. La même année le pape convoqua un Concile à Rome qui confirma l’orthodoxie de la vénération des saintes images.

Ayant perdu espoir de réussir ses tentatives de persuasion Léon III passa à l’action et prit des mésures péremptoires. Il se servi comme prétexte d’un énorme tremblement de terre à Constantinople qu’il tenait pour signe de colère de Dieu suite à la vénération des icônes. En 727 il promulgua un décret interdisant l’utilisation des images sacrées dans les rites réligieux. A partir de ce moment l’iconoclasme cessa d’être un mouvement intellectuel et la période des persécutions commença.

Une des premières actions de Léon fut l’ordre d’enlever l’icône du Christ qui se trouvait au-dessus du portail principal du palais impérial. La foule, en voyant le fonctionnaire en train de marteler la sainte image, s’empara de l’officier et le tua, ce qui entraina des exactions cruelles de la part de l’empereur. Pendant les années suivantes le décret fut mis en application : la vénération des icônes fut interdite, ceux qui gardaient des saintes images furent persecutés.

Parmi les iconoclastes on peut distinguer plusieurs niveaux de rejet des icônes. Les iconoclastes modérés refusaient la vénération des icônes mais ne voyaient pas d’objections à l’usage des représentations des saints dans des buts didactiques, éducatifs ou esthétiques. D’autres repoussaient toute utilisation des icônes mais acceptaient les autres objets sacrés. Enfin, les plus extrémistes refusaient tout les objets sacrés.

Léon III fut suivi sur le trône impérial par son fils Constantin V Copronyme qui se battait contre les icônes avec encore plus de zèle que son prédecésseur. La cruauté des persécussions était en partie prédéstinée par son détrônement tout au début de son règne suite à un coup d’état : pendant seize mois il fut écarté du trône imperial par le général Artavas qui rétablit la vénération des icônes dès son arrivée au pouvoir. Depuis, bien évidemment, Constantin Copronyme considérait tous ceux qui vénéraient les icônes comme des sympatisants d’Artavas et donc ses ennemis et complotants potentiels. Constantin V ecrivit plusieurs traités théologiques où il exposa ses arguments iconoclastes : impossibilité de représenter la nature divine du Christ, futilité des tentatives de peindre son image charnelle qui est temporaire et périssable. Il n’est point possible de représenter la nature divine, expliquait Constantin V, puisqu’en ce cas cette nature sera déterminable, descriptible, limitée, et donc déformée. Si les iconographes prétendent représenter simultanément les deux natures du Christ, ils les représentent inévitablement comme une seule et tombent donc dans l’hérésie des monophysites. Si ils se contentent de représenter uniquement la nature humaine de Jésus, dans ce cas ils divisent les deux natures indivisibles, ce qui signifie l’hérésie néstorienne. La seule image véritable du Christ, selon les iconoclastes, c’est l’Eucharistie. Quant aux icônes des saints, elles sont inutiles, puiqu’on apprend les vertus des saints en imitant leur mode de vie, en refléchissant sur leurs paroles, en essayant de suivre leur enseignement et de se montrer digne de leur mémoire, et non en regardant leurs images charnelles.

Des débats publics furent organisés pour convaincre les croyants d’abandonner la vénération des saints images. Souvent les adversaires théologiques qui refusaient d’accepter l’argumentation de l’empereur ont été détenus après les débats, ce qui n’était pas déraisonnable de la part de l’empereur au seuil du Concile.

Le Concile convoqué par Constantin Copronyme à Hiéréia commença ses travaux en 754. Trois cents trente huit évêques se réunirent pour postuler sur la controverse iconoclaste. Le chiffre de 338 éveques présents à Concile pourra paraitre représentatif à quiquonque qui ne savait pas qu’il n’y avait pas un seul patriache parmi eux, le partiarche de Constantinople étant décédé juste avant l’ouverture du Concile et quatre autres patriaches refusant de participer aux sessions du Concile iconoclaste ; c’est pour ça que ce Concile fut surnommé « Concile acéphale ». L’iconolâtrie fut condamnée par la décision officielle, et dès lors Constantin Copronyme se considérait dans son plein droit de persécuter ceux qui refusaient de se soumettre aux décisions de l’Eglise. Ces persécusions furent dirigées essentiellement contre les monastères puisqu’un grand nombre de moines refusaient d’accepter les décisions du Concile et la volonté de l’empereur en defendant opiniâtrement la vénération des icônes et s’acharnant à garder les saintes images. Les monastères récalcitrants furent fermés, transformés tantôt en casernes, tantôt en thermes, ou encore confisqués au profit de l’Etat, les moines envoyés en exil ou forcés de se marier. Beaucoup de moines trouvèrent refuge en Occident chez le pape de Rome ce qui suscita une montée extraordinaire de la culture byzantine en Occident, notamment en Italie du Sud.

Les persécussions sevères battaient son plein jusqu’à la mort de Constantin Copronyme en 775, la deuxième moitié de son règne étant encore plus cruelle que le début. Son successeur Léon IV continuait les répressions, pourtant avec beaucoup moins de zèle.

Sa veuve Irène qui règnait de 780 à 802 se donna beaucoup de peine pour rétablir la vénération des icônes : le patriarche iconoclaste fut remplacé par le secrétaire de l’imperatrice Tarace partageant ses idées, la préparation du Concile qui devait affirmer l’orthodoxie de la vénération des icônes pris deux ans. Le Concile convoqué par Irène à Constantinople devait commencer ses audiences en 786 mais les troupes des soldats fidèles au feu empereur ont empeché par la force les travaux du Concile. Ce n’est qu’en 787 que les évêques se réunirent sous la présidence du partiarche Tarace, cette fois à Nicée, et le Concile qui fut plus tard appelé le VII Concile oeucuménique ouvrit ses sessions.

La première question discutée par les 350 évêques fut l’admission des évêques qui exposaient leurs opinions hérétiques ou furent ordonnés par les hérétiques; il était décidé que tous pouvaient être admis dans l’Eglise sous condition de repentir.

Ensuite le Concile se prononça sur la question de l’iconoclasme. Les décisions du Concile de 754 furent rejetées et l’orthodoxie de la vénération des icônes fut affirmée. Le Concile déclara que la vénération des saints images était comprise dans la tradition de l’Eglise, tout comme vénération de la Sainte Croix, indiqua les places appropriées pour la disposition des icônes, mentionna les matériaux convenus pour la fabrication des icônes, se prononça sur les objets de la représentation (le Christ, la Sainte Vierge, les saints), sur le sens moral de la vénération des icônes consistant en l’aspiration vers l’archétype de l’image ainsi que sur les bases dogmatiques de la vénération des images sacrées. Le Concile donna des explications concernant la différence entre les termes latria (adoration), dûe au Dieu seul, et proskinesis (vénération), orientée vers les objets appartenant au monde créé qui nous sont chers. La vénération monte à l’archétype : celui qui vénère l’icône vénère la personne (hypostasis) représentée.

Le défaut de l’argumentation des iconoclastes consistait en la compréhension erronée de la notion de l’image : l’icône et son archétype étaient considérés comme consubstantiels voire identiques, alors même que les niveaux de l’existence de l’image et de la personne représentée sont différents. De la même façon l’Eucharistie ne peut pas être la seule icône du Christ possible, comme le déclaraient les théologiens iconoclastes ; au contraire, elle est identique au Christ, nous communions au Corps et au Sang du Christ, c’est-à-dire à Son Essence Divine, la Sainte Communion ayant la même nature Divine.

On voit bien qu’en ce temps la théologie de l’iconographie était déjà profondément élaborée grâce aux efforts des saints pères de l’époque, notamment de saint Jean Damascène. Suite à l’Incarnation du Fils de Dieu le monde a eu la possibilité de contempler l’image humaine de Dieu. Le Christ s’est montré aux apôtres même après la Ressurrection, donc il est possible de Le voir en Gloire. Le lumière céleste a été reflétée par la matière terrestre, la matière elle-même fut transfigurée par l’Incarnation, les images matérielles, charnelles ont donc un sens positif. L’icône ne s’efforce point de représenter la nature du Christ ; elle représente le visage de Jésus, la personne du Fils de Dieu qui est devenu Homme pour sauver le monde. Pourtant il fallait attendre encore plusieurs décennies avant que les décisions du VIIe Concile oeucuménique furent définitivement établies. Suite à un coup d’état Irène fut exilée au monastère où elle mourut un an plus tard. Nikiphore régna de 802 à 811 ; ses occupations principales étaient des efforts vains pour améliorer la vie quotidienne et augmenter le bien-être général ainsi que la guerre interminable contre l’entourage hostile de l’empire, les arabes et les slaves menaçant toujours les frontières. Mikhail I Rangavé le suivit sur le trône impérial en continuant essentiellement la même politique.

En 813 il fut détrôné par Léon V Arménien qui s’empara du pouvoir. En estimant que les échecs politiques des empereurs précédants avaient pour cause la sympathie des dirigeants du pays envers les icônes, Léon V convoqua le Concile à Constantinople en 815 qui confirma les vues théologiques de l’empereur, et les répressions iconoclastiques recommençèrent. Elles s’apaisaient sous Mikhail II qui n’était pas intéressé par les questions d’iconoclasme, mit fin aux débats théologiques et manifesta une tolérance considérable dans ce domaine tellement douloreux. Les persécutions récommençèrent à nouveau sous Théophile, qui confia à Jean Grammatique, un théologien éminent de l’époque, de reunir les évêques afin de condamner la vénération des icônes. Le Concile iconoclaste a eu lieu en 833 à Constantinople, et une dernière vague de repressions le suivit.

En 842 la veuve de Théophile Théodora le succèda au trône et s’occupa dès le début de son règne de la question de l’iconoclasme. Le Concile convoqué à Constantinople en 843 rétablit la vénération des saintes icônes, cette fois définitivement. Les décisions des Conciles furent promulgués le 11 mars 843. Depuis cette date le premier dimanche du Carême nous célébrons la Fête de la Gloire de l’Orthodoxie.

Chronologie

  • 716-741__Règne de Léon III Isaurien
  • 726______Début de l’iconoclasme
  • 727______Edit iconoclaste de Léon III
  • 741-775__Règne de Constantin V Copronyme
  • 754______Concile iconoclaste d’Hiéréia
  • 770-775__Règne de Léon IV
  • 775-802__Règne de Irène
  • 784______Ordonnance du patriarche Tarace
  • 787______VIIe Concile oecuménique confirmant les bases théologiques de la vénération des icônes
  • 802-811__Règne de Nikiphore
  • 811-813__Règne de Mikhaïl I Rangavé
  • 813-820__Règne de Léon V Arménien
  • 815______Concile iconoclaste de Constantinople
  • 820-829__Règne de Mikhaïl II
  • 829-842__Règne de Théophile
  • 842-855__Règne de Théodora
  • mars 843_Concile de Constantinople. Restauration définitive de la vénération des icônes


Bibliographie

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  • Vassina, M. Naturalisme de la « théologie en couleurs » contemporaine, ou l’iconoclasme du XXI siècle.
  • Vassina, M. Sur la question des fondements gnocéologiques des controverses iconoclastes.
  • Yasykova, I. Le gloire de l’Orthodoxie.

Notes

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